Techniques de construction de la voûte en berceau

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Plusieurs techniques sont mises en œuvre pour bâtir une voûte en berceau : 

-   Principes de construction

-   Berceau plein cintre, berceau brisé

-   Maçonnerie en blocage

-   Maçonnerie appareillée

-   Assises apparentes et assises peintes

-   Voûte en berceau continu

-   Voûte en berceau nervé

Certaines d’entre elles les principes, la maçonnerie et ‘aspect des assises s’appliquent aux  autres types de voûtes en arête et en ogive.



PRINCIPES DE CONSTRUCTION


La voûte en berceau est facile à concevoir et à réaliser au point de vue géométrie. Prenons l’exemple d’une voûte plein cintre qui a la forme d’un demi-cylindre.

Le coffrage en bois est simplement constitué de cintres en demi-cercle reliés par des planches, qui constituent ce qu’on appelle le couchis.

Les pierres reposent sur ces planches jusqu’au décoffrage où elles vont s’arc-bouter les unes contre les autres et rester en équilibre stable.

     

Lorsque toutes les pierres sont mises en place et que le mortier a pris, on procède au décoffrage. L’opération de décoffrage (ou décintrage) consiste dans un premier temps à abaisser très prudemment de quelques centimètres le cintre qui soutient le couchis pour que les voussoirs trouvent leur nouvelle position d’équilibre en s’arc boutant les uns contre les autres grâce au mortier encore malléable qui assure le contact entre eux mais permet les petits déplacements nécessaires à l’équilibre.

Puis lorsque le nouvel équilibre semble assuré on enlève complètement le cintre.

Cette opération extrêmement délicate, nécessaire quel que soit le type de voûte, est très rarement évoquée par les historiens alors qu’elle est essentielle dans la construction d’une voûte. Elle constitue une remarquable prouesse technique compte tenu des moyens de l’époque, prouesse qui est encore plus remarquable lorsqu’elle se déroule à 42 m du sol à Amiens ou à 46 m à Beauvais.


BERCEAU PLEIN CINTRE, BERCEAU BRISÉ


La voûte est dite en berceau plein cintre selon lorsque sa section est un arc plein cintre. Le dessin de l’arc est un demi cercle.

Elle est dite en berceau brisé lorsque sa section est un arc brisé appelé parfois ogive c’est-à-dire deux portions d’arcs de cercle s’appuyant l’un sur l’autre. Le dessin de l’arc est composé de deux courbes symétriques qui se coupent.




     

Royat – Église Saint Léger (63)                                                                    Cray – Église Saint Paul (71)


La supériorité de l’arc brisé sur le profil plein cintre en terme de stabilité et d’équilibre des forces est expliquée dans la page technique associée à la voûte d’ogive.

Dans l’architecture médiévale les courbes sont toujours des arcs de cercle parce qu’ils sont faciles à tracer, avec un compas sur un plan, avec un piquet et un cordeau au sol. Les étaiements et les cintres en bois étaient dessinés et assemblés au sol puis levés en position verticale pour assurer leur fonction de soutien et permettre ainsi de réaliser les profils verticaux de la construction.


MAÇONNERIE EN BLOCAGE


La maçonnerie en blocage est constituée de pierres ou de moellons de formes irrégulières grossièrement ajustés entre eux et noyés dans un bain de mortier.

Cette maçonnerie est facile à réaliser car elle requiert une main d’œuvre peu spécialisée tant pour la préparation des pierres que pour leur disposition. L’ensemble est maintenu par le coffrage durant la prise du mortier.

Lors du décoffrage les pierres vont trouver leur équilibre grâce aux forces qui vont se transmettre entre elle de proche en proche par l’intermédiaire du mortier jusqu’à la naissance de la voûte.

Les pierres ayant des faces non planes et étant grossièrement ajustées entre elles la voûte doit être suffisamment épaisse pour que les pressions se transmettent sans trop de désordre de la clé jusqu’à la naissance de la voûte.


       

La Bénisson Dieu – N.D. de la Bénédiction (42)                                                Berm sur Mer – Église Saint Nicolas (85)


MAÇONNERIE APPAREILLÉE


La voûte est réalisée en pierres taillées de façon à s’ajuster exactement entre elles.

Elles sont liées par une fine couche de mortier pour égaliser la pression sur toute la surface de la pierre.

Les pierres sont disposées comme dans un mur de façon à ce que les joints verticaux ne soient pas alignés d’une assise à l’autre. On appelle assise une rangée horizontale de pierre ayant toutes la même épaisseur.

La voûte apparaît comme un mur que l’on aurait courbé.

Elle est construite assise par assise comme un mur et non comme une succession d’arcs juxtaposés.


     

Le Thoronet – Abbaye (83)                                                                 Sainte Ouenne – Église Sainte Eugénie (85)


La voûte en berceau exerce une poussée sur les murs qui la soutiennent tout comme le fait un arc.

Il est parfois écrit que la voûte en blocage n’exerce aucune poussée car elle forme un bloc monolithique rigide et indéformable qui n’agit sur les murs que par son poids, comme le fait une charpente. C’est inexact car les pressions qui s’exercent sur les pierres et les moellons au sein de la voûte en blocage obéissent aux mêmes lois que celles qui agissent sur les voussoirs de la voûte appareillée :

-   Dans la voûte appareillée les forces se transmettent selon une trajectoire régulière et maîtrisée grâce à la géométrie des voussoirs qui s’ajustent parfaitement entre eux, ce qui permet d’avoir des joints fins et des voussoirs peu épais.

-   Dans la voûte en blocage, du fait de l’irrégularité avec laquelle les pierres sont disposées et le volume important de mortier, les forces sont moins bien moins canalisées et il faut une grande épaisseur pour permettre un bon enchevêtrement des pierres et assurer ainsi la solidité de l’ensemble.

Une voûte en blocage est par conséquent nécessairement plus épaisse qu’une voûte appareillée et donc plus lourde.

Plus la portée augmente, plus la voûte en blocage risque de s’affaisser sur elle-même et pour y remédier il faut qu’elle soit encore plus épaisse, donc encore plus lourde et la poussée qu’elle exercera sur les murs deviendra intolérable.

C’est pour cette raison que les architectes médiévaux ont compris, sans l’aide de calculs mathématiques, que l’usage de la voûte en berceau réalisée en blocage ne pouvait s’utiliser que pour des nefs relativement étroites.

Sinon à quoi bon avoir développé la voûte d’arête puis l’ogive si la voûte en blocage résolvait le problème de la poussée latérale en l’éliminant ?


ASSISES APPARENTES ET ASSISES PEINTES


La partie inférieure de la voûte, celle que l’on voit lorsqu’on est en dessous et qui s’appelle l’intrados, était enduite pour protéger la maçonnerie et pour lui donner une surface lisse et régulière qui pouvait ensuite être peinte. Lorsqu’on observe une voûte enduite il est difficile voire impossible de savoir si elle est en blocage ou appareillée. Ceci est vrai pour toutes les maçonneries que ce soit des murs ou des voûtes, en berceau en arête ou en ogive.

Parfois l’intrados de la voûte était peint de fresques. Souvent on dessinait sur l’enduit de la voûte de faux joints de pierre pour simuler une voûte parfaitement appareillée. On reconnaît ces fausses assises peintes à leur régularité, alors que les assises en pierres de taille réelles sont toujours plus irrégulières.


     

Assises apparentes                                                                   Assises peintes

Nieul sur l’Autise – Abbatiale Saint Vincent (85)                Moutiers les Maufaix – Église Saint Jacques (85)


VOÛTE EN BERCEAU CONTINU


La voûte en berceau continu est ininterrompue entre les deux extrémités de la nef.

La voûte continue libère la perspective augmentant ainsi l’impression de profondeur de l’édifice.  L’intrados de la voûte peut recevoir de superbes fresques comme à Saint Savin. Ce type de voûtement a été fréquemment pratiqué dans les granfs édifices d'Auvergne.


     

Saint Savin sur Gartempe – Abbatiale Saint Savin (86)                                     Saint Nectaire – Église Notre Dame (63)


La voûte en berceau continu s’est peu développée parce qu’elle est très certainement plus difficile et plus coûteuse à réaliser que la voûte nervée qui a été largement utilisée partout ailleurs.

La voûte en berceau continu nécessite un coffrage de la longueur de la nef soutenu par un système d’étaiement très robuste avec des cintres de place en place pour assurer sa rigidité et limiter les risques de torsion et de déformation sous le poids des pierres durant la construction, avant et pendant le décoffrage et la prise du mortier.

Ce système est très coûteux en bois. La voûte doit être construite d’un seul jet après que les murs aient été érigés. La nef ne peut être mise au service du culte qu’une fois totalement achevée.


VOÛTE EN BERCEAU NERVÉ


La voûte nervée est interrompue de place en place par des arcs doubleaux qui reposent sur des colonnes engagées.


     
Poitiers – Collégiale Notre Dame La Grande (86)                                                  La Celle – Église Saint Blaise (18)

La voûte nervée confère une structure modulaire à la nef qui peut ainsi être construite "par tranche". La travée devient le module de base pour l’élévation et le couvrement.



Le coffrage de la voûte entre deux arcs doubleaux est plus court, il est rigidifié par les arcs doubleaux déjà mis en place sur lesquels il s’appuie. Il suffit de trois cintres et deux coffrages pour couvrir pas à pas toute une nef quelle que soit sa longueur.

Pendant qu’on laisse prendre le mortier de la travée achevée on construit la travée adjacente. Une fois celle-ci achevée on décoffre la travée précédente, on déplace le cintre et le coffrage pour construire la travée suivante. On peut alors achever la finition de la partie achevée et le mettre en service pour le culte sans attendre l’achèvement de la nef.




Cette construction par modules consomme moins de bois car les cintres sont réutilisés et augmente la résistance de la voûte. Les arcs doubleaux augmentent la rigidité de la voûte qui repose sur eux car en ces endroits elle ne peut mécaniquement pas se déformer.

C’est principalement pour des raisons économiques (coût de la construction, disponibilité progressive de l’édifice en construction) que la voûte en berceau nervée s’est plus largement développée que la voûte en berceau continu au détriment de l’aspect esthétique.